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De Mackandal à Christophe : les révoltés de Saint-Domingue et leur force mystique

Dans l’imaginaire haïtien, dire quelqu’un n’est pas seul ne veut pas toujours dire qu’il est tout simplement accompagné, mais s’ajoute l’idée d’une assistance surnaturelle. Alors, dire que les esclaves révolutionnaires de Saint-Domingue n’étaient pas seuls, ainsi doit-il être compris. De Bookman, le forgeur de la Cérémonie de Bois-Caïman, à Christophe, le Roi du Nord, voyons le surnaturel qui leur imposait au naturel.

Jean François Mackandal

Mackandal était un houngan, prête vaudou. Donc en contact direct avec les loas. Alors en tant que franc vaudouisant animiste, en plus des pouvoirs mystiques qui lui conféra la réputation d’invincibilité et d’immortalité, il était aussi doté d’un ensemble de connaissances chimiques. Ce qui lui permettait de manier les plantes pour composer des poisons qu’il distribuait aux esclaves domestiques notamment pour tuer les colons. D’où qu’on le surnommait « l’empoisonneur ». Le jour de son exécution dans un brasier, le poteau a cédé et il a disparu, confirmant de biais l’immortalité qu’il se clamait.

Bookman Dutty Zamba

De même, Bookman était un houngan. On a qu’à lire sa prière à la Cérémonie du Bois-Caïman, qu’il organisait en chef d’ailleurs, pour avoir à l’œil la source de son pouvoir mystique.

« Le dieu qui créa la terre, qui créa le soleil qui nous donne la lumière. Le dieu qui détient les océans, qui fait gronder le tonnerre. Dieu qui a des oreilles pour entendre. Toi qui es caché dans les nuages, qui nous observe où que nous soyons, tu vois que le blanc nous a fait souffrir. Le dieu de l’homme blanc lui demande de commettre des crimes. Mais le dieu en nous veut que nous fassions le bien. Notre dieu, qui est si bon, si juste, nous ordonne de nous venger de nos préjudices. C’est lui qui dirigera nos armes et nous apportera la victoire. C’est lui qui nous aidera. Nous devrions tous rejeter l’image du dieu de l’homme blanc qui est si impitoyable. Écoutez la voix de la liberté qui chante dans tous nos cœurs »

Biassou

Biassou racontait sans cesse aux esclaves révolutionnaires qu’il était inspiré de « Dieu ». De là, il leur faisait croire que s’ils succombaient aux combats, ils repartiraient vivre chez eux, dans leur tribu en Afrique.

Romain Rivière

Romain Rivière était un homme noir libre. Propriétaire d’une plantation de café dans la colonie. Mais il s’habillait comme une femme, se disant possédé par un esprit féminin, la Vierge, dont il était la filleule. D’où le surnom « Romaine La Prophétesse ». Il faisait croire recevoir la mission de cet esprit d’exterminer tous les colons. Ainsi vers 1793, il était le chef d’un soulèvement qui contrôlait les deux principales villes du sud d’Haïti, Léogâne et Jacmel7.

Hyacinthe Ducoudray

Comme tous les autres, Ducoudray faisait partie des révolutionnaires n’étant seuls de Saint-Domingue. Alors sou la protection magique d’une queue de taureau, Hyacinthe menait ses troupes glorieusement à la victoire à chaque affrontement.

Halaou

Pour assurer sa protection, Halaou portait toujours un coq blanc sous son bras et à sa garde de longue queues de bœuf qui, disait-il, pouvait détourner les balles.

Toussaint Louverture

C’est le moins évident de cette liste. Sachant que dans sa constitution de 1801, il prohibait explicitement le vaudou. Pourtant, Toussaint quand il allait au combat, il se coiffait toujours d’un turban rouge, en l’honneur d’Ogou-Feray qui inspirait ses décisions.

Jean-Jacques Dessalines

En Dessalines, ses pairs voyaient l’incarnation d’Ogou. Jamais, retient la tradition, il n’a entrepris quoi que ce soit sans consulter préalablement ses mystères Nago, notamment Ogou-Chango, le génie du tonnerre. Avant de grimper son grand et beau cheval pour la bataille, il se ceignait la tête d’un foulard rouge pour vénérer Shango qui lui instillait sa fureur guerrière et qui même des fois, le possédait et prenait la commande des combats.

Henri Christophe

Successeur septentrional de Dessalines, Christophe est connu pour son comportement intrépide. Faut-il savoir que cette assurance dans la foulée était d’inspiration surnaturelle. Il se disait donc les bénéficier de la planète Mars et du grand astre solaire. N’a-t-il pas une conception animiste, chère au vaudou, dans les parages ? C’est envisageable, elle est dans la même lancée de la prière de Bookman au Bois-Caïman.

« 1804 est issu du vodou !». Déclaration de Jean Price Mars à la Société haïtienne d’Histoire et de Géographie.  Crions Amen !

 

Références 

Odette Mennesson-Rigaud, Le rôle du vaudou dans l’indépendance d’Haïti, 1958.

Gasner Joint, Libération du vaudou dans la dynamique d’inculturation en Haïti, 1999.

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