| Anecdote, Histoire

La drôle anecdote du premier hymne national d’Haïti

Connaissez-vous un pays actuel qui n’a pas d’hymne national ? Probablement il en existe. Mais il faudra se taper le crâne plus d’une fois pour en sortir un. Alors, c’est pour vous dire que l’hymne, chant national, pour toute nation indépendante, est un élément incontournable, généralement le manifeste du patriotisme.

Ces prémices nous introduisent dans un drôle fragment de l’histoire d’Haïti. Le sait-on bien avec quelle élégance cette nouvelle nation acquis sa naissance, et toutes les manœuvres menées pour assurer sa survie. Comment donc imaginer que, près d’un siècle après, il n’a existé aucun hymne national pour chanter ces prouesses et se jurer d’en défendre les héritages ?

Cette besogne, ce sont les écrivains, notamment poètes haïtiens, qui s’y employaient officieusement. On se rappelle les poètes engagés, notamment l’un des plus importants, Antoine Dupré. Eh bien ! c’est bien un poète qui allait sauver la face des autorités haïtiennes dans une situation officielle des plus importantes, et permettre la naissance du premier hymne national du pays.

En 1893, un navire-amiral allemand visitait Port-au-Prince. Et les officiers voulaient rendre hommage à la nation haïtienne. Jusque-là, tout était normal. Mais quand les autorités haïtiennes se sont mises à la préparation de l’évènement, le protocole les plongea jusqu’au cou dans l’embarras. En effet, selon le protocole, l’hymne national du pays hôte devait précéder celui des visiteurs officiels.

Alors, dans l’extrême urgence, le président Florvil Hyppolite présenta le problème au chef d’orchestre du Palais national d’alors, Occide Jeanty. Vite fait, il sortit de son répertoire un « Salut présidentiel composé en 1888 qu’il lui présenta sous le titre de Chant national ». À cette musique énergique aux cadences enlevées, Jeanty joignit des vers d’Oswald Durand aux accents épiques. Des vers du célèbre poème Quand nos aïeux brisèrent leurs entraves

Quand nos aïeux brisèrent leurs entraves

Ce n’était pas pour se croiser les bras

Leur sang à flots engraissa nos collines

À notre tour, Jaunes et Noirs allons !

Creusons le sol légué par Dessalines

Notre fortune est là dans nos vallons

À l’œuvre, ou tout est éphémère !

Ayons droit à l’égalité

Nous foulerons plus fiers la terre

Avec cette devise austère

Dieu ! Le travail ! La liberté !

Cette ode d’Oswald Durand aura servi d’hymne national jusqu’à 1904, date que La Déssalinienne allait prendre le relais. Cette dernière est l’œuvre de la collaboration du musicien Nicolas Geffrard et du poète Justin Lhérisson, et qui sert encore aujourd’hui comme chant national.

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